[PLAGE] May I cream your back ?

Depuis le labyrinthe, quelques jours se sont passés. La nuit de l’événement, j'étais tellement fatigué que j'ai peiné à trouver le sommeil. Paradoxal, je sais. Le lendemain a été délicat, sur base de mauvaise humeur, aussi n'ai-je pas mis un pied dehors, ni contacté qui que ce soit. La nuit suivante, les cauchemars ont fait leur oeuvre. Un couloir de roche infini, avec des tas de détours qui ne menaient à rien de plus que la suite du couloir, et au bout, un oiseau dans une cage. J'avais pensé qu'il serait impossible de rêver ici, mais à l'évidence j'avais tort. C'est seulement arrivé à la troisième nuit que j'ai réussis à dormir sans obstacle. Trop épuisé pour luter, je suppose. Trop alcoolisé surtout. Je n'ai pas ouvert les yeux durant prêt de quinze heures, et pas même les voix en contre bas, à cause du rideau mal fermé, n'ont eu raison de mes songes.

Au quatrième jour, mon cul mal réveillé sort enfin du lit. Les cheveux en bataille et le regard flou, la volée de flotte que je m'envoie me fait le plus grand bien. Un choc thermique qui aide à reprendre pied. Un coup d’œil au hub. Il est 9h du matin. Si tôt? Il faut dire que quand j'ai fermé les yeux, il était encore tôt, mais j'étais également alcoolisé depuis des heures avant ça. Un bordel sans non, oui. Je sais. La bouche pâteuse, je la rince d'un peu d'eau que je crache dans le pot. Le lavage de dent qui suit ne fait pas de mal. Je vais mieux. Je ne sais pas si c'est le temps passé, la nuit de sommeil ou la cuite légendaire de la veille, mais je me sens mieux. Hangover, mais mieux. De quoi me demander si Brooks l'a eu aussi difficile que moi. Il est vrai que, perdu dans mes propres troubles, je n'ai pas voulu le contacter. J'aurais été imbuvable avec lui. Si les PNJ de l'auberge avait une conscience, ils pourraient en attester. Je lui envoie donc un message, simplement savoir comment il va. Et puis je jette un œil dehors. Il fait beau. Un grand soleil et pas une pointe de vent. Alors je lui envoie un autre message. Une invitation, qu'il accepte.

Entre temps, j'ai pris une soupe froide locale. Un plat frais d'été, codé pour aider avec la gueule de bois. Puis j'ai engloutis une bonne grosse moussaka pour compenser. Heureusement pour tout le monde, lorsque la fin d'après-midi arrive, mon avatar est toujours aussi svelte que... toujours. Je porte un bête pagne autour de la taille, un panier à la main et une couverture sous le bras. J'ai donné rendez-vous à Brooks à la sortie de la ville, et sans surprise, il est là. Faut dire que je suis un peu en retard. - Hey, gorgeous. - Lancé-je en arrivant à son niveau. Je le gratifie d'un large sourire. À me regarder, on ne croirait pas qu'encore quelques heures plus tôt, je rampais au sol comme un déchet. - Ready?

Je ne lui ai pas vraiment dit ce que j'avais prévu. Je lui ai donné l'heure et lui ai dis de prendre son maillot de bain. Mais comme nous nous trouvons dans la Grèce antique, je doute qu'il ait trouvé quoi que ce soit. Bref, je lui donne la couverture à porter pour me libérer le bras, et l'embarque sur les chemins de campagne autour de la cité. Des cultures d'oliviers et de vignes. D'oranges et de citrons. Des fruits qui poussent presque en permanence, mais nous continuons la route. Nous allons vers l'Est de la carte, suivons la route principale puis en sortons. - Par là. - Lui indiqué-je en prenant la direction de la falaise. Est-ce que je compte le pousser d'en haut? Bien sûr que non. - Il y a un chemin dans la falaise. Il y a des cartes spéciales dans la boutique interne, qui indique des lieux secrets que la carte normale ne montre pas. C'est l'un d'eux.

Le chemin est sinueux, à flanc de falaise mais tout de même stable. Camouflé par un peu de végétation, il mène au pied de la roche, à une petite crique discrète. Une plage et la mer bleue. À l'horizon, le ciel se fait déjà orange. Le soleil commence sa descente. L'heure de l'apéritif. - Vous avez atteint votre destination. - Fais-je en imitant grossièrement les GPS du siècle dernier. - On peut profiter de la mer et de la plage, et j'ai pris de quoi manger et boire. Qu'est-ce que tu en dis?

J'en dis que j'avais pas eu de rendez-vous aussi romantiques depuis longtemps. C'est un rencart, n'est-ce pas ? Pas que ça nous engage à quoi que ce soit... - Un sourire. Ce n'était pas vraiment l'objectif, mais je comprends où il a pu pêcher ça. Le repas, le coucher de soleil, la belle plage isolée... Je suppose que d'une certaine manière, ça en est un. Rencart. Bottes abandonnées, je fais quelques pas dans le sable encore tiède. - C'est sublime. Merci de partager tes lieux secrets... entre autres. - C'est joli mais c'est vite ennuyeux quand on est seul. - J'y suis venu quand j'ai acheté la carte, pour voir. J'ai dû rester quelques minutes avant de repartir. À ce moment-là, l'effusion de foule de la ville était plus attrayante que la solitude calme. Ça a changé.

Alors, y a quoi dans ce panier dis-moi ? Des spécialités... Du vin ? - Je me retourne. Il a installé la couverture et s'est assis. - Il y a toujours du vin. - Boire de l'eau dans un monde ou l'hydratation est secondaire... inutile. Tombant à genoux sur la couverture, j'ouvre le panier. J'en sors deux coupes ainsi qu'une bouteille de vin. La panier se déplie pour offrir un socle stable où déposer ça et je nous sers. À l'intérieur, on peut également voir quelques fruits, ainsi que des choses emballés. - Santé. - Dis-je en lui tendant le verre. Les coupes tintent, le vin roule dans la gorge. - Du coup, j'ai pris du raisin, des olives, du fromage et de la charcuterie. Et du pain, bien sûr. On devrait manquer de rien. - Dis-je en attrapant un grain de raisin pour le faire éclater entre mes dents.

Une petite gorgée pour la route et je me lève. Aller à la plage et rester sur le sable? Pas drôle. L'armure aux franges trop courtes rejoint le sol, me laissant pour seul vêtement cet antique slip de cuir. Un Subligaculum, selon le vendeur. Le contact du cuir contre la peau sensible n'est pas vraiment des plus confortable, mais ça a l'avantage de me faire une poche particulièrement proéminente. Pas que j'ai à me plaindre de cet avatar, cela dit. - Tu viens? - Lâché-je en me retournant pour filer vers les vagues, inconscient qu'a l'arrière, le slip couvre tout juste les trois-quarts des fesses.

Damn ce que ça fait du bien ! - Trop occupé à me laisser dévorer par les vagues, j'en avais presque oublié mon compagnon. Lorsque je me retourne, je réalise qu'il a retiré les nombreuses couches de sa toge colorée et ne porte désormais plus qu'une courte tunique blanche qui laisse transparaître sa peau au travers. Soulevée par les remous de l'eau, s'il n'y avait pas cet aspect trouble des vagues, je doute que la clarté de la mer laisserait place à l'imagination. De toute façon, mon regard est bien plus haut.

Il dépose un baiser dans mon cou, ce qui me tire un sourire. - N'empêche le slip en cuir... ça te coupe pas la peau ? Ça n'a pas l'air agréable à porter, même si j'avoue, ça te va bien. Surtout de dos. - Un peu, mais est-ce que tu as vu le paquet que ça me fait? Ça vaut totalement le coup. Parait qu'il faut souffrir pour être beau. - Pas que j'ai eu à souffrir pour afficher cet avatar. Peut-être l'attente de mon tour, ou la pénétration de l'aiguille, mais on ne peut pas vraiment appeler ça une longue souffrance. Profitant que ses bras sont déjà autour de mon cou, je passe mes mains sous ses fesses et exploite l'apesanteur de l'eau pour le hisser contre moi, ses jambes autour de ma taille. - Toi par contre, tu n'as pas suivis mon conseil. - Sa bourse en liberté se presse contre le bas de mon ventre. - Je t'avais dis de prendre un maillot et tout ce que tu trouves c'est une tunique blanche, alors que tu savais qu'on allait aller dans l'eau? Loin de moi l'idée de juger, mais ça donne tout de même l'impression que tu n'avais pas vraiment envie de t'habiller. - Un sourire malicieux passe sur mes lèvres. - T'es sûr que tu veux pas que je t'achète ce skin nudiste? Il est plutôt bien fichu, et tu peux paramétrer tout le physique avec encore plus de précision que lors de ton arrivée.

Une tunique c'est largement assez? Je maintiens: aucun respect pour les instructions. D'un autre côté, je comprends. Se baigner nu est plaisant, mais il n'est nu, justement. Pour l'instant. - Si tu veux, mais je préfère comme ça. Je suis libre et tu en vois assez sans que je dévoile tout non plus. Après, si Monsieur Grey insiste... - Un sourire pince mes lèvres. - J'ai une chambre rouge... - Commencé-je, le regard ancré dans le sien, avant qu'il ne s'élève, pensif. - ... mais c'est juste une chambre, qui s'avère être rouge. Du coup, je sais pas si ça compte. - Il rit, dépose un baiser sur ma joue. Je suppose que c'était la bonne réponse? Heureusement pour tout le monde, ça m'importe peu. Le doute est juste un jeu.

Tu trouves mon skin actuel moche ? Ou pas assez... imposant ? Pas qu'il soit parfait, mais justement, c'est pour ça que je l'aime bien, je crois. - Bien sûr que non. - Dis-je, presque surpris par la suggestion. - Et puis, beau, moche, tout ça c'est subjectif. Encore plus dans un endroit pareil. - Mes cours de Philosophie m'auront au moins laissé ça. La subjectivité du gout. Ça vaut pour l'art, comme pour la beauté ou essentiellement n'importe quelle préférences individuelles. - L'important c'est que toi tu l'aimes. - Dis-je d'un air sérieux. - Mais si ça peut te rassurer, si je pouvais, je te boufferais. - Air pensif à nouveau. Mes mains déjà sur la position stratégique, je n'ai qu'à déplier mon index pour le glisser entre ses fesses et toucher, sans rien faire de plus, la douce frontière de l'orifice. - Oh wait, I can. - Lâché-je dans un rire avant de faire mine d'aller le mordre dans le cou.

Mes dents ne saisissent pas la peau pour autant. Elles se posent seulement, mais le geste termine en un baiser un peu fou. Relâchant l'étreinte, je le rends à Poséidon. L'eau fraîche s'engouffre à nouveau entre nous. Il fait bon, beau, l'eau est agréable et à l'horizon, le soleil descend tranquillement. Le ciel tire dangereusement sur le rose-orangé. Les nuages sont sur le point de s'embraser. - T'as déjà pris le temps de regarder le coucher de soleil depuis que tu es ici? - Demandé-je avant de me mettre en planche. Flotter est reposant. Relaxant. - Ils ont fait un boulot impressionnant. C'est magnifique. - D'un coin de l’œil je l'aperçois encore, mais mon regard observe le ciel au-dessus de nous. - On en fait plus des comme ça dans le Réel.

Finalement, c'est un peu ça qu'on achète aussi : du temps, pour prendre notre temps. C'est tellement bon de rien foutre en vrai... - J'acquiesce d'un air entendu. - J'étais toujours beaucoup trop occupé pour m'attarder sur les choses simples. Même me poser pour manger était un défi. Seul, je veux dire. - Repas de travail, rencontre avec des investisseurs, diners de charité et j'en passe. Manger seul, au calme, sonnait comme des vacances pour moi. Prendre une douche sans être dérangé par le téléphone, un paradis. Et regarder maintenant cet environnement? Voilà. C'est ça le paradis.

Et puis je kiffe les vêtements et la bouffe ici. - Oh oui! Les vêtements! - Surprenante réaction, oui. - Enfin, la bouffe est sympa, mais j'adore les vêtements! Tellement... différent de ce qu'on a l'habitude de porter. Et puis, honnêtement, à vivre et dormir en costume trois pièces ajutés et chaussures en cuirs qui compressent les pieds, pouvoir me balader comme je veux ici c'est particulièrement divin. - Pris dans mon engouement, j'ai perdu mon équilibre et retrouve pieds sur le sable noyé. - Même sans parler d'être nu. Mon plastron déjà, super agréable à porter. Mais même les toges qu'on a vu l'autre jour. On respire, c'est facile de bouger avec. - Je tire sur le tissu imbibé qu'il porte et colle à sa peau, en guise d'illustration. - Enfin, le cadre y est probablement pour beaucoup. Je doute qu'on serait si libre avec quelques bouts de tissus si on se trouvait... je sais pas, dans des contrés plus froides.

J'étouffe un rire. - C'est étouffant. - Réponds-je au sujet des costumes trois pièces. - Une camisole de force, mais jolie, et purement sociale. - Et l'univers sait que j'ai essayé mainte fois de m'en débarrasser, mais à la façon de ces bouts de tissus capitonnés, la pression sociale est indestructible. Je hausse des épaules à sa question sur la mode. - Quand on a commencer à diaboliser la nudité, probablement. - Après tout, mis à part les régions froides, les autres se sont vus accoutrés de bien plus de longueurs, de bien plus de couches. Pourquoi? Certes, certaines tenues sont magnifiques et très élégantes, mais pourquoi en faire la norme. Pourquoi aussitôt que l'on voit un peu de peau, on approche dangereusement de l'insolence?

Tiens... - Tiré de mes pensées, je remarque qu'il s'est un peu éloigné. - Hé viens voir ! Y'a un truc bizarre ! - Mes sourcils se froncent. La sensation du sel solidifié sur ma peau tire un peu. - Qu'est-ce qu'il y a? - Dis-je en nageant dans sa direction, le slip en cuir toujours moulant mes fesses. Je me stabilise à côté de lui, incapable d'ignorer le sol qui s'assombrit quelques mètres plus loin. Il n'aurait pu s'agir que le relief naturel du fond de la rive, s'enfonçant avec la distance, mais la forme de ce trou parait trop net. Trop géométrique. Anormal ou.. volontaire? - Tu crois qu'on devrait aller voir ?

Je ne peux m'empêcher d'imaginer une immense labyrinthe de roche sous le sable. Les fresques colorées aux messages inquiétants et mystérieux. Et si c'était un autre glitch? Ou une erreur? Et s'il s'agissait de quelque chose d'autre? Un mystère à dévoiler? Un mystère dans un mystère. Et si on restait piégé là-dessous? Je sais parfaitement que l'on ne peut pas mourir, pas vraiment, mais la sensation de se noyer n'a rien d'une promenade de santé. Littéralement. - Ça pas l'air très profond. On peut plonger et essayer de voir si on peut voir quelque chose. Ce n'est peut-être rien. Le niveau de la plage est inégal un peu partout.